Neuville Saint vaast et les guerres
Au printemps 1915, l’armée d’Urbal entame une offensive de grand style tendant à percer les lignes allemandes au Nord d’Arras et à s’emparer de la crête de Vimy qui domine la plaine de Lens.
Pour sa part,
le 20e corps a reçu mission d’enlever Neuville Saint Vaast, grosse bourgade qui avant la guerre comptait 1200 habitants, et étaient tombée aux mains de l’ennemi en octobre 1914. Les allemands se sont organisés fortement sur cette position.
Protégée par 4 lignes successives de tranchées,
Neuville Saint Vaast s’est muée en véritable forteresse.
Des 150 maisons qui composent l’agglomération, pas une qui n’ait été crénelée et machinée, pas un soupirail qui ne braque un canon de mitrailleuse.
Les caves qui servent d’abris aux défenseurs ont été étagées et matelassées, les rez-de-chaussée barricadés et bétonnés, le tout renforcé par des fils de fer barbelés de l’épaisseur d’un doigt.
Pour ravitailler la garnison, une voie de 0m60 suit la rue principale du village et pousse ses ramifications jusqu’aux avancées.
En définitive
un point d’appui formidable dont la garde est confiée à des troupes d’élite du premier Corps Bavarois.
Le 9 mai 1915, notre offensive se déclenche. En 2 heures,
la 11e division atteint les lisières sud de Neuville Saint Vaast, où des combats acharnés s’engagent, en même temps que sur les tombes du cimetière, pris et reperdu 2 fois au cours de la journée.
Cependant la défense ennemie se fait plus opiniâtre. strong>Deux tiers du village reste à enlever.
Pour en finir,
le général d’Urbal fait appel à une unité fraîche, la 5e division, qui arrive d’un secteur calme, commandée par un chef déjà réputé : le général Mangin.
On lui confie la rude mission d’achever la conquête de Neuville Saint Vaast. Mais l’homme est de ceux que nulle tâche n’effraie, qu’aucune difficulté ne rebute.
Mangin ne perd pas de temps. Le 28 mai, ses troupes à peine débarquées, il procède à l’enlèvement de quelques maisons pour rectifier son front de départ.
Sans souci des bombardements violents dont l’artillerie allemande écrase nos lignes sous des obus de 105, de 150 et de 210, il pousse rigoureusement ses préparatifs.
Et le 1er juin, il lance ses régiments à l’attaque. Mais prises sous des feux croisés de mitrailleuses, enveloppées dans des nappes de gaz asphyxiants,
nos troupes sont contraintes de regagner leurs tranchées de départ. Le gain de la journée se borne à 2 maisons, mais la lutte se poursuit toute la nuit à coups de grenades.
Les jours suivants, notre préparation d’artillerie est reprise avec des moyens renforcés, et le 5 juin, Mangin déclenche une
nouvelle attaque ayant pour axe la rue centrale de Neuville qui mesure près d’un kilomètre de longueur.
A gauche le 36e régiment après 4 tentatives, reste cloué au sol. Il s’est heurté à des défenses intactes et l’explosion d’une mine a enseveli un gros d’assaillants.
A droite le 129e, plus heureux, progresse sous un feu intense, mais son chef le colonel Denis-Laroque a été tué l’un des premiers.
A la nuit, tout un groupe d’habitations reste entre nos mains, mais une grande confusion règne parmi nos troupes, où les unités des 6 bataillons d’attaque sont enchevêtrées. Nos
pertes sont considérables et la défense ennemie tient toujours.
Informé de cette situation, le général Foch convoque les généraux d’Urbal et Mangin. Estimant qu’il faut profiter coûte que coûte de notre supériorité actuelle sur l’ennemi, il décide de poursuivre la lutte jour et nuit sans désemparer jusqu’à la conquête totale du village.
Mangin donne ses ordres en conséquence, bien résolu à ne pas laisser à l’adversaire une minute de répit. Il faut relever le 129e, très éprouvé, par le 36e, et la bataille recommence avec une nouvelle fureur.
Les 6 et 7 juin,
nos troupes progressent à coup de grenades de rue en rue, de maison en maison. Le 8 juin est une journée particulièrement dure. Reprise dès 2 heures du matin, nos attaques se poursuivent pied à pied, et réussissent à emporter un groupe important d’habitations dans la rue centrale.
La garnison de l’une d’elles, cernée de toute parts, refuse de se rendre, elle est anéantie par sa propre artillerie. A 15 heures enfin, l’ennemi en désordre se replie vers le nord.
La nuit arrive à temps pour permettre aux chefs survivants de réorganiser nos unités mélangées, décimées, à bout de souffle. Le 9 juin, au petit jour, l’assaut suprême est donné. Dans un élan irrésistible, nos soldats oubliant toute leur fatigue et entrevoyant le terme de leurs efforts, arrachent aux ultimes défenseurs les dernières maisons du village.
Ces 14 jours de combats sanglants ont coûté à la 5e division
2 600 hommes et 72 officiers. Du côté allemand, 500 cadavres retrouvés sous les ruines fumantes, sans comptés les corps ensevelis sous les décombres, témoignaient de l’extraordinaire violence de la lutte.
Opération modèle comme conquête méthodique d’un village fortifié, splendide témoignage de la bravoure et de l’opiniâtreté française,
la conquête de Neuville Saint Vaast faisait l’honneur à nos troupes héroïques autant qu’au chef énergique qui les avait conduites au succès.